Fällkniven F1x Elmax | Évaluation par Padraig Croke
Lorsque la collection X de Fällkniven est sortie en 2019, j'ai eu la chance de pouvoir tester le S1Xb (le grand frère du F1X que je vous présente aujourd'hui), avec son impressionnant revêtement en carbure de tungstène. Et jusqu'au jour d'aujourd'hui, c'était pour moi l'un des meilleurs couteaux d'outdoor. En tout cas parmi tous ceux que j'ai pu tester. J'étais donc très curieux de tester ce modèle plus petit, le F1X, mais ça n'avait pas tellement d'intérêt de le tester en 2019, étant donné que la seule différence était sa taille. Mais maintenant que Fällkniven a remplacé l'acier CoS par de l'Elmax, je n'ai pas pu résister.
Sommaire
Un peu d‘histoire
Le F1X est le petit frère d'une collection de couteaux Fällkniven disponible en 3 tailles, soit le F1, S1 et l'A1. Le modèle F1 Fällkniven original est depuis 1995 le couteau de survie officiel des pilotes de l'armée de l'air suédoise, d'où son surnom de couteau de pilote. La plupart des unités aériennes militaires équipent leurs pilotes, au cas où leur avion serait abattu derrière les lignes ennemies. Ils ont ainsi l'équipement nécessaire pour survivre, s'échapper et se sauver. Le F1 existe depuis presque 30 ans, et plusieurs versions ont vu le jour, avec diverses modifications et améliorations au niveau de la géométrie du tranchant, du choix de l'acier, de la forme du manche et des matériaux, et du type de fourreau. Mais il semble qu'ils continuent sans cesse d'améliorer cette petite bombe.
Mes premières impressions
À l'époque, dès que j'ai eu le S1X en main, j'ai tout de suite adoré la sensation qu'il offrait. Le poids et l'épaisseur de l'acier, les plaquettes avec une bonne accroche, la finesse du manche, tout est parfait pour l'utiliser, même avec des gants. Le F1X est similaire... mais différent. Avec sa lame plus courte, il a un équilibre optimal quand on le tient en main, peut-être même encore meilleur que le S. Cette taille de lame offre un meilleur contrôle et plus de finesse, ce qui rend ce F1X mieux adapté pour le bushcraft et les coupes de précision. De plus, la construction du swedge pinpoint à l'arrière de la lame facilite un travail tout en finesse. Cela me permet de bien voir exactement où je place la pointe de ma lame, ça limite la friction et la résistance et évite que le couteau ne se coince dans une boite de conserve (mais j'y reviendrai).
Comme d'habitude avec Fällkniven, j'aime beaucoup la géométrie convexe de la lame. J'ai toujours apprécié le tranchant des couteaux Fällkniven, et le F1X n'y fait pas exception. Je reviendrai plus tard sur le choix de l'acier, mais pour faire court, l'Elmax est une excellente surprise. Il y a quelques années, j'avais un autre couteau en Elmax, et je regrette beaucoup de l'avoir vendu. Du coup, j'étais bien content de pouvoir à nouveau tester un tel couteau !
L'étui en Zytel, comme sur tous les modèles X, est très résistant, et c'est peut-être l'élément que je préfère sur ce couteau. Le Zytel est un polymère renforcé de fibre de verre, qui résiste à presque toutes les substances chimiques, mais aussi aux chocs, à la chaleur et à presque tout ce que l'on peut rencontrer dans la forêt. Sa forme, fine et discrète, fait qu'on oublie vite qu'on le porte sur soi, et il m'est arrivé plusieurs fois de le chercher sur le campement alors qu'il était attaché à ma ceinture ! Le mécanisme de verrouillage est également un point fort de cet étui. C'est un système bien solide, mais qui est facile à manipuler. Le second verrouillage est un peu superflu, car le couteau est déjà bien fixé, mais c'est une sécurité supplémentaire, qui peut être appréciable, par exemple quand j'attache mon couteau à un harnais de poitrine ou à mon sac à dos.
Indestructibilité potentielle et restrictions d'utilisation
La collection X de Fällkniven était la première à avoir une construction en pleine soie, ce qui était nouveau pour la marque. Ce n'est qu'une supposition, mais je pense que ce changement est dû au fait que de plus en plus de bushcrafters se sont mis à utiliser ces couteaux Fällkniven. Auparavant, leur base de clients se composait plutôt de chasseurs, de pêcheurs et de soldats de l'armée suédoise, pour qui une telle construction en pleine soie n'avait pas beaucoup d'importance.
Mais pour Fällkniven, l'élargissement de leur gamme avec des modèles en pleine soie n'était pas qu'une exception. Ils ont embrassé l'idée et ont pris les choses bien au sérieux, en réalisant même des tests en laboratoire pour déterminer le point de rupture et les faiblesses de l'acier. Ils voulaient apparemment s'assurer d'avoir conçu les couteaux les plus solides qui soient, des couteaux qui résisteraient à tout. Il faut bien préciser que lors des tests de rupture, de nombreuses lames ont été cassées ! Ce qui a permis à l'entreprise de repenser leur design pour créer un couteau encore plus robuste.
On trouve parfois de drôles de choses sur YouTube, et j'ai vu des vidéos où des personnes entièrement habillées en camouflage, avec des masques à gaz, faisait tout pour casser leur A1. Bon, il faut préciser que certaines de ces vidéos durent jusqu'à 20 minutes et présentent par exemple : quelqu'un qui plante son couteau dans le toit d'une vieille voiture, qui réduit en poudre un bois de cerf, ou qui frappe son couteau contre une surface en grès jusqu'à ce qu'il se casse. De ce que j'ai pu comprendre, la plupart du temps, quand le couteau casse, ce sont les couches d'acier laminées qui se séparent. Ce qui m'impressionne, c'est que Fällkniven connaît parfaitement les défauts potentiels de l'acier laminé, c'est pourquoi ils ont doté leur version Pro d'acier Elmax, 20% plus solide qu'un acier laminé, selon eux.
Comme l'affirme un fabricant de couteaux : "Le couteau X est le plus solide, le plus tranchant et le plus sûr de tous les couteaux de production en acier inoxydable. Si votre vie est en danger, vous pouvez toujours compter sur votre couteau X. Il est conçu pour résister à toutes les pressions pouvant être appliquées par la main humaine ; il est donc quasiment indestructible". Il n'y a plus qu'à vérifier ! Mais ils donnent quand même une condition : "uniquement dans le cas d'une utilisation correcte et prudente du couteau, à savoir comme un outil de précision tranchant."
À mon avis, on passe à côté de l'essentiel. Soit il est indestructible, soit il est juste capable d'assurer les fonctions normales d'un couteau. Les deux sont synonymes de bonne qualité, mais il s'agit d'un débat interminable en ce qui concerne les couteaux destinés à la survie. Je pense que c'est à vous de décider, en tant qu'utilisateur d'outils de coupe de bonne qualité, ce que vous attendez de votre couteau : qu'il soit juste d'excellente qualité ou qu'il soit complètement indestructible. Il se peut que l'on regrette notre choix dans une ultime situation de survie, si l'on doit frapper des pierres à plusieurs reprises avec son couteau... hmm. Et si vous deviez l'utiliser pour construire une maison ?
Introduction de l'Elmax
Selon moi, l'Elmax est un excellent choix pour un couteau de survie. Comme je l'ai dit plus tôt, je possédais il y a quelques années un petit trapper en Elmax, dont j'étais très content. Il est comparable au S30V, l'Elmax offrant le meilleur des deux mondes (acier inoxydable et acier carbone). Il s'agit d'un acier inoxydable poudré, fabriqué par Bohler-Uddenholm en Suède. Il résiste très bien à la corrosion grâce à sa forte concentration en chrome, et conserve longtemps son tranchant. Grâce à cette forte concentration en chrome, il a tous les avantages de l'acier carbone, tel que la possibilité de créer des étincelles avec un allume-feu, et une dureté optimale. L'Elmax est assez facile à entretenir, et il suffit d'un morceau de papier de verre humide et sec et d'un vieux tapis de souris comme support, pour redonner son tranchant à la lame. Par contre, cet acier n'est pas donné, et ça se ressent bien sur la facture de ce F1X. L'Elmax est un excellent choix pour les utilisateurs exigeants, qui recherchent la meilleure qualité.
Indispensable pour les situations de survie
Un couteau de survie n'a pas besoin d'être énorme pour être utile. Si c'était le cas, l'armée suédoise n'utiliserait pas ce F1, n'est-ce pas ? Et honnêtement, quel est le risque de se retrouver vraiment en situation de survie ? Mais si jamais on se retrouve dans une telle situation, on peut compter à coup sûr sur son Fällkniven. Concentrons-nous d'abord sur les activités du quotidien, celles que l'on est sûr d'avoir à effectuer. En tant que civil, les situations d'urgence et de survie se présentent plutôt quand une personne se retrouve en détresse en pleine nature et a besoin d'aide ou d'un sauvetage immédiat. Par exemple quand on se perd, ou qu'on se casse une jambe au beau milieu de la forêt. Ou quand le temps se gâte et que notre corps se refroidit dangereusement, ou si l'on se déshydrate et que l'on a besoin d'un abri du soleil. À part les situations les plus urgentes où il faut soigner un problème respiratoire, un membre cassé ou un saignement, les priorités sont différentes dans chaque situation. Ces priorités ne sont pas dans un ordre particulier.
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Traitez d'abord les blessures vitales, telles que les saignements importants, les gènes respiratoires ou les membres cassés. Les étapes suivantes sont secondaires pour la survie.
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Signalez votre présence au personnel de secours, ou appelez à l'aide pour être secouru au plus vite. Les règles qui consistent à ne laisser aucune trace de son passage n'ont plus d'importance quand il s'agit de rester en vie. Faites tout ce qui est possible pour vous sortir de cette situation.
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Conservez une température corporelle correcte, pour éviter un coup de chaud ou de froid.
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Buvez et mangez suffisamment
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Restez à l'abri et au sec
Je rentre ici dans les détails pour qu'on se pose les bonnes questions. Je pense qu'il faut revoir notre idée de la "survie". Nous ne sommes, pour la plupart, pas militaires, et nous ne vivons pas dans une sorte de scénario post-apocalyptique. La plupart du temps, les situations dans lesquelles on se retrouve ne sont pas si compliquées et notre réflexion reste notre meilleur atout. Pour chacune de ces tâches, peu importe combien de temps elles doivent être effectuées, à quoi peut me servir un couteau ? N'importe quel bon couteau bien tranchant est un outil utile dans ce genre de situation ; pas besoin d'avoir un couteau incroyablement performant si on est bien entrainé. Mais regardons de quoi est capable ce F1, pour déterminer s'il est indispensable ou non d'avoir un grand couteau pour la survie.
Tâches de survie avec le F1x
Faire du feu est l'une des tâches les plus importantes afin de remédier aux problèmes mentionnés ci-dessus. Purifier de l'eau potable, rester au sec et au chaud, rester alerte et signaler sa position : un bon feu vous sera indispensable. Mais pour faire du feu, on a besoin de plusieurs choses...
La préparation du bois est probablement l'une des tâches les plus importantes à réaliser avec un couteau. On commence souvent avec de grosses bûches que l'on coupe en plus petits morceaux, surtout s'il a plu et que le bois est mouillé. Souvent, les bûches sont sèches à l'intérieur, et en commençant avec du résineux, le bois chauffe et brûle vite, ce qui permet de pouvoir sécher le reste du bois. La lame du F1x a une longueur idéale pour faire du petit bois : une grande partie de la lame sépare le bois et il reste suffisamment de place pour y taper.
De plus, la superbe émouture convexe y est parfaitement adaptée, et permet de fendre toute sorte de bois sans effort. Le tranchant convexe est également parfait pour couper à travers les nœuds, un peu comme un fer de hache qui glisserait entre les couches du bois. Un tranchant convexe est bien plus robuste qu'un tranchant scandinave. Mais il demande un peu d'entrainement. Imaginez un tranchant scandinave comme un manche de guitare et un tranchant convexe plutôt comme un manche de violon. Sans repères précis sur une lame convexe, il faut se fier à son instinct, et réussir à sentir le tranchant. Une fois que vous l'avez bien en main, il est très agréable à utiliser ! Que ce soit pour réaliser des hérissons pour le feu (feathersticks), ou pour fendre une bûche, avec un tranchant convexe de bonne qualité, vous êtes bien équipé.
*Capacité à travailler le bois 9/10 *
Comme vous le savez, on peut utiliser le tranchant au dos d'une lame avec un firesteel. De plus, si cette lame est faite d'un acier avec une forte teneur en carbone, on peut même faire des étincelles avec une pierre à feu ou un morceau de pyrite de fer, comme si on avait un kit pierre à feu / tige d'acier. Même si l'Elmax est qualifié d'acier inoxydable grâce à sa haute teneur en chrome, il contient tout de même une grande quantité de carbone. 1,7% pour être exact, ce qui est plus que la plupart des aciers inoxydables d'entrée de gamme et déjà bien dans la catégorie des aciers carbone. J'ai donc réussi éventuellement à obtenir une étincelle avec le dos de la lame en utilisant une pierre à feu, mais pas aussi facilement qu'avec un acier avec une teneur en carbone plus élevée. Mais c'est possible. Le dos du F1x n'est pas le plus tranchant qui soit, mais il est bien utile. J'ai eu du mal à créer une bonne étincelle avec le firesteel, mais j'ai finalement réussi à obtenir une flamme en râpant un bon tas d'écorce de bouleau. En plus du dos de la lame, j'ai trouvé que le pommeau était aussi bien utile, bien que pas très pratique. Mais ça fonctionne !
Capacité à créer des étincelles 5/10
Pour faire du feu avec un couteau, on peut aussi utiliser une autre méthode : en fabriquant un outil de friction, tel qu'un arc à feu. Cela nécessite bien plus de préparation et de connaissances, et si vous en êtes à utiliser cette technique en situation de survie, c'est probablement votre dernier recours (... vous avez tous vu "Seul au monde").
Pour ce test, je n'ai pas fait d'arc à feu, mais j'ai effectué de nombreux gestes similaires à la construction d'un tel set. Par exemple, la fabrication de petit bois (le long des nervures et en travers) et la réalisation d'encoches avec le F1x. Le swedge, que j'ai mentionné ci-dessus, est idéal pour faire des bords bien nets et graver des détails tout en précision. La petite taille de la lame offre un meilleur contrôle qu'une grande, où il faut plus étirer la main pour réussir à bien placer son pouce.
Travail de précision 8/10
Voici les différentes techniques que vous pouvez utiliser pour faire du feu avec ce couteau. Enfin, j'ai voulu tester ce couteau pour récolter et purifier de l'eau potable. Il me fallait donc un récipient, et j'ai réfléchi à ce qu'on pourrait avoir à sa disposition en situation de survie. Une vieille boite de conserve ferait bien l'affaire. Ou, encore mieux, une boite encore pleine ! Avec un peu de chance, ce qu'elle contient est encore bon et le jus est encore intact. Ouvrir une boite de conserve avec un couteau, c'est un jeu d'enfant, surtout avec un Fällkniven. Ici encore, le swedge est bien utile, et il évite que la lame ne reste coincée trop profondément dans la boite. En perçant le dessus plusieurs fois, puis en tournant la lame, j'ai réussi à l'ouvrir et j'ai pu manger les pêches. J'utilise maintenant la boite comme récipient, pour récupérer de l'eau et la purifier au dessus du feu. Si vous avez le moindre doute sur un point d'eau, faites la bouillir au-dessus du feu pour la débarrasser des bactéries qu'elle peut contenir.
Mais pour pouvoir faire bouillir de l'eau sur le feu sans se brûler les mains, il nous faut une poignée. J'ai donc cherché un épicéa dans la forêt, puis j'ai creusé pour récupérer une solide racine. Ce matériau fait office de corde naturelle, et est probablement utilisé depuis la nuit des temps. J'ai gratté l'écorce très facilement avec mon Fällkniven, puis après avoir percé deux trous dans la boite avec la pointe de la lame, j'y ai passé la racine, pour former une poignée me permettant de récupérer de l'eau et de retirer la boite du feu.
En situation de survie, ce couteau peut servir à toutes les tâches du quotidien : pour préparer des repas, couper des racines (pour en faire de la corde, de la paracorde ou des lacets) et en cas d'urgence pour couper des liens ou des tshirts en coton.
Diverses tâches de survie 8/10
Le Fällkniven F1x m'a t'il sauvé la vie ?
On a beau être très bien équipé, il y a toujours un risque que l'on rencontre une fin tragique au beau milieu de la nature. Aucun outil ne vous permettra de vous sauver la vie. Votre vie est entre vos mains, et c'est en vous préparant correctement, en vous entrainant et en choisissant le bon équipement, que vous éviterez de vous mettre en danger. Mais si vous vous retrouvez malgré tout dans une situation critique, vous devez savoir quoi faire pour vous vous en sortir. Un bon couteau vous y aidera certainement, si vous êtes bien préparé et si vous savez comment l'utiliser de la manière la plus efficace possible. Si jamais vous vous retrouviez dans une situation très improbable où il vous faudrait frapper de la roche avec votre couteau, ou bien couper le toit d'une voiture, le F1X serait-il à la hauteur ? Honnêtement, je pense que oui. Mais je n'ai pas essayé.
Par contre, j'ai mis ce couteau compact à l'épreuve, avec mes meilleures compétences de survie, et franchement il a bien assuré. Cela ne m'étonne pas qu'on équipe les pilotes de l'armée avec. Et entre nous, si c'est bon pour eux, c'est suffisant pour moi !
Padraig Croke
Padraig Croke est l’animateur du podcast The Trial by Fire, qui a existé de 2018 à 2023, un podcast hebdomadaire dédié à l’outdoor. Officiellement designer et photographe, il est également passionné d'outdoor et de bushcraft. Lorsqu'il n'est pas occupé à rédiger des évaluations pour notre site, il part dans la nature et crée de superbes films et photos de ses aventures.
Pour plus d’informations sur ce podcast et pour y accéder, il vous suffit de chercher « the trial by fire podcast » sur votre plateforme d’écoute préférée. N’hésitez pas à suivre @thetrialbyfirepodcast sur Instagram.
Merci Padraig pour cette super évaluation !